Apports et limites méthodologiques d’une approche géoarchéologique dans la modélisation des dynamiques d’un réseau de peuplement humain en contexte fluviatile
Résumé
À l’heure où la notion « d’Anthropocène » occupe le devant de la scène scientifique tout en étant sujette à de nombreuses controverses, l’étude des interactions entre les sociétés anciennes (du Néolithique au Moyen Âge), les paysages fluviaux et les oscillations climatiques à l’Holocène s’avère fondamentale. Elle permet d’apporter une réflexion sur l’évolution des rapports entre les groupes humains et leur espace de vie (risques passées, exploitation et gestion des ressources) qui peut servir à mieux comprendre le fonctionnement présent des hydrosystèmes fluviaux face au changement globaux et proposer des perspectives de gestion adaptées. Face à une documentation archéologique hétérogène, fragmentaire et acquise par des modes de collectes variés, tenter de modéliser les dynamiques d’un réseau de peuplement humain s’avère être une tâche particulièrement délicate qui nécessite de composer avec un nombre croissant de biais (historiographie, taphonomie) et d’incertitudes (extension spatiale et attribution chronologique des gisements, choix des fossiles directeurs). Les synthèses géoarchéologiques récentes soulignent (1) la diversité des réponses anthropiques face au risque fluvial en milieu rural et urbain et (2) la variabilité spatio-temporelle des réponses environnementales face aux forçages anthropo-climatiques, reflet de l’hétérogénéité de l’espace, des « effets de site » et de facteurs morphologiques d’échelle plus locale (cadre morpho-structural, système de pentes). Cette communication orale se propose de montrer (1) l’apport de la géoarchéologie fluviale (paléohydrographie, paléohydrologie et paléohydraulique) dans la caractérisation des rythmicités hydrologiques du Rhône et de la Loire à l’Holocène ; puis (2) de souligner les limites méthodologiques des mises en perspectives géoarchéologiques des données naturalistes. En géoarchéologie, l’absence d’une véritable réflexion méthodologique autour de l’utilisation des bases de données archéologiques, la généralisation d’un fait archéologique local à un espace élargi et la non prise en compte des relations hiérarchiques et fonctionnelles entre les différentes sites conduit bien souvent à simplifier, voire gommer totalement, la complexité des interactions entre un réseau de peuplement et son environnement. Parmi les perspectives qui se dégagent, on abordera l’intérêt de mettre en œuvre une démarche prospective à la charnière entre archéologie spatiale et géoarchéologie fluviale dans la plaine d’inondation de l’Eure moyenne.