Anticiper l’évolution des territoires
Abstract
In the middle of the last century, the emergence of a new risk, the climate risk, was a sudden and largely unexpected phenomenon that has significantly changed our vision of environmental issues. Of course, the link between humans and nature is strong and ancient: a country like France has very few landscapes that have not been shaped by generations of builders, foresters or farmers. But climate change linked to greenhouse gas emissions has brought about a radically new problem, whose novelty results from its very nature. The risk of climate change was revealed by equations or very indirect observations, before it was even really observable. But the speed of its progression, with greenhouse gas emissions in the atmosphere which have so far never stopped increasing and accelerating their growth, has made a huge difference. Moreover, this evolution has developed in a context where it has been intimately intertwined with other rapidly changing issues: energy, environmental, social, political and demographic. However, despite the variety of warning signals put forward by the scientific community, despite the now widely shared recognition of the existence of strong climate challenges, the dynamics with which these changes have developed, very often remain underestimated and even misunderstood. Climate risk is still very often associated with a certain form of immobility, marked by the repetition of discourse that gives the impression that the stakes have changed little over the last few decades. This incomplete awareness is one of the most important brakes on the development of effective environmental policies, because it erases an essential dimension of current climate issues: we are facing a problem that is very advanced in its development and everything is no longer possible today. The future world will necessarily be marked by the need to arbitrate between partially contradictory issues.
Ne pas laisser la planète se réchauffer à un niveau qui dépasse de plus de 1, 5 la valeur qui était celle de la période préindustrielle, est impératif si l’on s’en tient aux risques qui pèsent sur les territoires les plus vulnérables. Mais la possibilité d’y parvenir est considérablement plus restreinte qu’elle ne l’était il y a 30 ans, juste avant le sommet de la Terre de Rio en 1992. Les émissions de CO étaient alors de 5 à 6 milliards de tonnes de carbone par an — elles ont doublé depuis cette date. De fait, nous avons déjà considérablement engagé le futur, comme en témoignent des phénomènes tels que la fonte des glaciers et de la banquise, le réchauffement en profondeur des océans, ou l’évolution des écosystèmes. La situation est plus grave encore, si l’on se réfère au futur proche : le réchauffement des quelques prochaines décennies est déjà fortement contraint par les émissions passées et le mélange rapide des gaz à effet de serre par la circulation atmosphérique en fait un problème mondial grandissant qui s’impose à tous. Nous avons de moins en moins la possibilité de modifier significativement l’évolution climatique locale au travers de nos propres actions. Il est donc nécessaire de s’adapter progressivement à des évolutions qui relèvent à la fois de la part déjà irrémédiable des changements à venir et des retards ou échecs des actions internationales. Les territoires ont, dans ce cadre, un rôle privilégié à jouer. C’est, en effet, à leur échelle que se développent les impacts majeurs des changements climatiques et que se fait une grande part des émissions de gaz à effet de serre. C’est donc à ce niveau que devront s’élaborer des stratégies de co-bénéfice entre atténuation et adaptation au changement climatique. Et c’est donc aussi là que devront se définir des arbitrages entre différents usages des sols, différentes stratégies de protection de la biodiversité, ou différentes gestions de zones vulnérables, telles les villes, les montagnes ou les littoraux. Ceci impose aussi une connaissance approfondie et pluridisciplinaire de ces territoires qui sont tous différents les uns des autres. L’exemple de la Nouvelle-Aquitaine, au sein de laquelle le projet Acclimaterra a mis en œuvre une série très large de visites régionales (http://www.acclimaterra.fr) montre qu’il est nécessaire de prendre la mesure des évolutions en cours, à la fois en écoutant l’expression des divers impératifs sociaux et en facilitant la prise de décisions de l’ensemble des acteurs régionaux par une « mise en récit » du diagnostic scientifique. Le projet Acclimaterra a aussi été matérialisé par la production de deux rapports qui ont rassemblé 400 scientifiques et ont été publiés sous la forme de livres soigneusement édités pour permettre d’atteindre le grand public. Ce travail a montré que les régions, en profitant du lien qui les unit à leur population, peuvent ainsi constituer un lien important d’innovation et de réflexion et apporter des éléments de solution importants au problème climatique.
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